
Saint-Etienne de Meaux
"Un gothique élancé au coeur de la Brie"
Présentation générale
Nichée au cœur de la cité épiscopale de Meaux, en Seine-et-Marne, la cathédrale Saint-Étienne s’élève avec sobriété et puissance au-dessus des toits de la vieille ville. Elle incarne toute la richesse et la complexité de l’architecture gothique en Île-de-France, alliant grandeur verticale, finesse ornementale et spiritualité lumineuse. Si elle reste moins médiatisée que Notre-Dame de Paris ou Amiens, elle n’en demeure pas moins un témoin essentiel de l’évolution du gothique français, du primitif au rayonnant, jusqu’aux envolées flamboyantes de la Renaissance.
La cathédrale actuelle a été édifiée à partir de la fin du XIIe siècle sur les vestiges d’un sanctuaire roman plus ancien, lui-même construit sur les ruines de bâtiments antiques. Cette longue gestation, rythmée par les aléas politiques, les guerres et les crises économiques, a modelé un édifice composite mais profondément harmonieux. Chaque travée, chaque corniche y raconte une époque et un style, donnant à l’ensemble une profondeur historique peu commune. Dédiée à saint Étienne, premier martyr de la chrétienté, la cathédrale est aussi le cœur spirituel du diocèse de Meaux. L’édifice conserve aujourd’hui une forte dimension cultuelle, tout en accueillant un nombre croissant de visiteurs et de mélomanes, séduits par son acoustique exceptionnelle et son atmosphère inspirante.
Dimensions et architecture
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Longueur totale : 85 mètres
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Largeur au transept : 38 mètres
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Hauteur sous voûte de la nef : 33 mètres
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Hauteur de la tour nord : 60 mètres
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Style : gothique primitif, rayonnant et flamboyant
Le plan suit une croix latine, avec une nef à cinq vaisseaux, un transept marqué, un chœur profond à déambulatoire et chapelles rayonnantes. L’élévation interne est caractéristique du gothique classique : grandes arcades, triforium, fenêtres hautes avec remplage. Le choeur ajouré, baigné de lumière, évoque ceux de Reims ou de Beauvais, par son ampleur et ses verrières hautes.
Histoire de la construction
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Vers 1170 : Lancement du chantier gothique sur l’emplacement d’une église romane antérieure.
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XIIIe siècle : Construction du chœur, du déambulatoire, puis du transept.
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XIVe-XVe siècle : Travaux ralentis par la guerre de Cent Ans ; poursuite de la nef et des portails.
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XVIe siècle : Construction du clocher-tour inachevé ; ajout de nombreux éléments flamboyants.
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Révolution française : Dégradée, la cathédrale est dépouillée de ses statues et trésors liturgiques.
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XIXe-XXe siècles : Restauration et sauvegarde par les Monuments historiques.
Éléments remarquables
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La façade occidentale : Bien qu’asymétrique, elle conserve de beaux portails sculptés et une grande rosace.
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La tour nord : Édifiée au XVIe siècle, elle devait avoir une sœur jumelle au sud, jamais construite. En réalité, une tour en bois surnommée “Tour noire” a été construite au XVe siècle sur le socle de la tour sud, et fait actuellement l’objet d’une restauration majeure.
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La nef, longue et lumineuse, s’élève sur quatre niveaux : grandes arcades, tribunes, triforium ajouré et hautes verrières.
Son élancement gothique met en valeur la verticalité des piles fasciculées et la finesse des voûtes d’ogives. -
Le chœur gothique, très lumineux, rappelle les ambitions du gothique rayonnant avec ses arcatures élancées et ses verrières hautes. il a été reconstruit entre 1253 et 1278 par Gautier de Varinfroy, après l’effondrement du chœur primitif.
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Les vitraux : Ils mêlent panneaux médiévaux et verrières néo-gothiques du XIXe siècle, réalisées notamment par Steinheil, maître-verrier reconnu.
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Le triforium sculpté : Dans le chœur et la nef, le triforium, niveau intermédiaire entre les grandes arcades et les fenêtres hautes est finement sculpté et constitue un bon exemple du gothique rayonnant francilien.
Restauration et conservation
La cathédrale a subi d’importants dommages au fil des siècles, notamment durant les guerres et la Révolution. Elle a été restaurée à plusieurs reprises aux XIXe et XXe siècles, avec une attention particulière à la stabilité des voûtes et à la réfection des vitraux. Une nouvelle campagne de restauration a débuté dans les années 2000 pour assainir les parements extérieurs.
Anecdotes et faits insolites
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L’évêque de Meaux, Bossuet, prédicateur et homme politique du XVIIe siècle, y officia. Un monument en son honneur orne un des collatéraux. Sa pierre tombale est visible dans le chœur.
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Un projet de flèche pour surmonter la tour nord fut envisagé au XIXe siècle, mais jamais réalisé.
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Pendant la Première Guerre mondiale, la cathédrale servit brièvement de refuge pour les populations civiles fuyant l’avancée allemande.
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Une petite sculpture d’archer sur la façade orientale viserait, selon la légende, la maison d’un chanoine réputé avare — une vengeance humoristique d’un tailleur de pierre.
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Une inhumation royale oubliée Avant même la construction gothique, la veuve du comte de Champagne Henri Ier fut inhumée dans la cathédrale vers 1198. Ce fait, souvent oublié, témoigne de l’importance politique de Meaux à l’époque.
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Une cathédrale-basilique : La cathédrale a été élevée au rang de basilique mineure. Une plaque commémorative à l’intérieur rappelle cette dignité honorifique accordée par le Vatican.
La cathédrale de Meaux est un joyau gothique à la croisée des influences stylistiques. Sa construction, marquée par de nombreuses interruptions, lui confère une richesse architecturale foisonnante, tout en maintenant une forte unité spirituelle et esthétique. À la fois monument historique et lieu de foi vivant, elle domine la ville de Meaux avec élégance et puissance.
![]() La facade ouest et sa tour du XVIe siècle | ![]() Le choeur gothique rayonnant (XIIIe siècle) | ![]() Le transept sud et son portail des Merciers |
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![]() Voûte sur croisées d’ogives au niveau du transept |



