
Cathédrale de Canterbury
"Berceau du christianisme anglais"
Présentation générale
La cathédrale de Canterbury, située dans le Kent au sud-est de l’Angleterre, est l’un des hauts lieux du christianisme en Europe et le siège spirituel de l’Église anglicane. Inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1988, elle combine des éléments d’architecture romane, gothique primitif et gothique perpendiculaire anglais. Connue pour avoir été le théâtre de l’assassinat de Thomas Becket en 1170, elle est devenue un important lieu de pèlerinage au Moyen Âge, immortalisé notamment dans les "Contes de Canterbury" de Geoffrey Chaucer. Avec ses dimensions impressionnantes, son chœur gothique majestueux et sa tour centrale, la cathédrale est un symbole de la foi et de l’histoire anglaise depuis plus de neuf siècles.
Dimensions et architecture
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Longueur totale : 180 mètres
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Largeur au transept : 47 mètres
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Hauteur sous voûte : 24 mètres
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Hauteur de la tour centrale (Bell Harry Tower) : 72 mètres
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Style : Roman normand, gothique primitif, gothique perpendiculaire
La cathédrale adopte un plan en croix latine complexe, marqué par la présence de deux transepts, un chœur allongé avec déambulatoire et chapelles rayonnantes, et une tour centrale à la croisée, typique du gothique anglais. Elle est un savant assemblage de styles architecturaux. La nef conserve encore des éléments de l’époque romane, avec des arcs en plein cintre massifs et une élévation sobre. Le chœur, reconstruit après un incendie au XIIe siècle par l’architecte Guillaume de Sens, introduit le style gothique primitif en Angleterre, avec des voûtes d’ogives et des élévations plus aériennes. Le style perpendiculaire, typiquement anglais, s’impose dans la tour centrale, érigée au XVe siècle, dont la verticalité et la clarté des lignes contrastent avec le gothique flamboyant continental.
Histoire de la construction
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597 : Fondation par saint Augustin, missionné par le pape Grégoire Ier pour convertir les Anglo-Saxons.
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1070 : Refonte complète par les Normands après l’invasion de Guillaume le Conquérant.
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1174 : Incendie ravageant le chœur ; reconstruction en style gothique par Guillaume de Sens, puis William l’Anglais.
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1220 : Translation du corps de Thomas Becket dans le nouveau sanctuaire gothique.
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1379-1500 : Travaux de grande ampleur dans le style perpendiculaire : nef, cloître, et surtout la tour centrale.
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1538 : Pèlerinages supprimés par Henri VIII lors de la Réforme anglaise. Le sanctuaire de Becket est détruit.
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XIXe-XXe siècles : Restauration générale, en particulier après les dommages causés par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale.
Éléments remarquables
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Le sanctuaire de Thomas Becket : Bien que le sanctuaire original ait été démantelé au XVIe siècle, le lieu de son assassinat reste l’un des espaces les plus visités, marqué par une simple dalle. Une flamme brûle en permanence en mémoire du martyr.
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La nef, reconstruite à partir de la fin du XIVe siècle dans le style gothique perpendiculaire, se caractérise par une élévation élancée à trois niveaux (grandes arcades, triforium et claire-voie), des piles fasciculées soutenant des voûtes quadripartites nervurées, et une abondance de lignes verticales soulignant la hauteur ; l’usage de la pierre claire et les fenêtres à remplages complexes assurent une luminosité accentuée, typique de cette phase tardive du gothique anglais.
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Le chœur, reconstruit après l’incendie de 1174, est un chef-d’œuvre du gothique primitif anglais, alliant élancement vertical, déambulatoire lumineux et chapelles rayonnantes, dans une composition inspirée du modèle français mais adaptée à la tradition monastique anglicane.
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La chapelle des Buffs (ou The Buffs’ Chapel) est une chapelle latérale située dans le déambulatoire sud du chœur de la cathédrale de Canterbury. Elle est dédiée au régiment britannique The Buffs (Royal East Kent Regiment), l’un des plus anciens régiments d’infanterie de l’armée britannique, dont les racines remontent au XVIe siècle.
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Le cloître, construit principalement aux XIIIe et XIVe siècles, présente une structure quadrangulaire délimitée par quatre galeries voûtées d’ogives, reposant sur des colonnettes élancées en pierre calcaire locale ; les remplages ajourés des arcades, typiques du gothique perpendiculaire anglais, permettent un éclairage naturel tout en assurant une transition harmonieuse entre l’espace monastique et le jardin central.
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La tour Bell Harry : Construite entre 1490 et 1505, elle culmine à 72 mètres et offre une vue exceptionnelle sur le Kent. Elle abrite les cloches principales et un carillon.
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Les vitraux : La cathédrale conserve l’un des ensembles les plus anciens de vitraux médiévaux en Angleterre, notamment les vitraux de la "Genealogie du Christ" (XIIe siècle) et ceux racontant la vie de Thomas Becket.
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La crypte : Partie la plus ancienne de l’édifice, de style roman normand, elle est impressionnante par ses piliers massifs et sa sobriété. Elle conserve encore quelques fresques médiévales.
Restauration et conservation
La cathédrale a fait l’objet de nombreuses restaurations au fil des siècles. Dès le XIXe siècle, des architectes comme George Gilbert Scott ont œuvré à sa consolidation. Durant la Seconde Guerre mondiale, la cathédrale a été partiellement endommagée lors du Blitz, mais des restaurations rapides ont permis de préserver les structures essentielles. Au XXIe siècle, de nouveaux défis sont apparus, notamment l’érosion des pierres et les infiltrations d’eau. Un vaste programme de conservation a été lancé pour restaurer la tour centrale, les vitraux, et les toitures.
Anecdotes et faits insolites
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Un symbole de résistance : Pendant la Seconde Guerre mondiale, alors que le Kent était l’une des zones les plus bombardées, les habitants de Canterbury ont organisé des veillées pour surveiller la cathédrale et éteindre les débuts d’incendie, sauvant ainsi l’édifice.
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La pierre de Becket : L'endroit où Thomas Becket a été assassiné est marqué par une dalle de marbre. On raconte que même les rois venaient s’y agenouiller au Moyen Âge.
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Une inspiration littéraire : Geoffrey Chaucer, dans ses "Contes de Canterbury" (XIVe siècle), a immortalisé le pèlerinage vers la cathédrale comme un voyage initiatique et social, reflétant la diversité de la société médiévale anglaise.
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Le "pèlerinage interdit" d’Henri II : En 1174, Henri II, accusé d’avoir causé la mort de Becket, effectue une pénitence publique à Canterbury, en marchant pieds nus et en se laissant flageller par les moines.
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Une cathédrale “pluriculturelle” : Guillaume de Sens a importé des techniques françaises (ogives, chapiteaux sculptés, arcs brisés) dans le chœur, faisant de Canterbury un pont entre l’art roman continental et le gothique anglais naissant.
La cathédrale de Canterbury est bien plus qu’un chef-d’œuvre architectural. Elle est un témoin vivant de l’histoire religieuse et politique de l’Angleterre, un centre spirituel majeur et un haut lieu de la mémoire collective. Sa silhouette gothique, ses vitraux enchâssés de lumière et son histoire marquée par le martyre et la réconciliation en font un monument profondément ancré dans l’imaginaire européen. À travers les siècles, elle a su se renouveler sans perdre son âme, accueillant fidèles, pèlerins et visiteurs dans une atmosphère de recueillement et de beauté. Sa préservation et sa valorisation témoignent de l’attachement durable du Royaume-Uni à son patrimoine spirituel et culturel.
![]() Canterbury, siège de l'Eglise anglicane | ![]() La tour Bell Harry (XVe siècle) | ![]() Arcs brisés et croisées d'ogives complexes |
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![]() La façade occidentale et ses deux tours | ![]() Vitraux de la chapelle de la Corona | ![]() Le cloître des XIIIe et XIVe siècle |
![]() Le choeur (gothique primitif français XIIe siècle) | ![]() Le chevet et la chapelle de la trinité | ![]() La nef (gothique perpendiculaire anglais XIVe siècle) |
![]() La chapelle des Buffs, dans le déambulatoire |